High Rise

Mais où était-il passé ? Lowen était venu ici pour se faire un peu d'argent. En entrant dans l'appartement, il savait que ça allait se passer comme ça. Vu le monde qu'il y avait à cette soirée, il savait très bien comment ça allait se terminer : son client ferait sa vie à un moment donné et Lowen le perdrait de vue. Et quelle merde ça allait être pour le retrouver. Il y était depuis une dizaine de minutes déjà, et commençait à perdre espoir. Finalement, il s'était réfugié dans la grande cuisine, une cuisine dont il rêverait en temps normal. Si seulement il avait un salaire décent.

Les mets étaient innombrables. Mais ce n'était pas vraiment ce que cherchait Lowen. Lui, il était intéressé pour une prise. Il n'y avait plus d'électricité à son appartement et il voulait profiter d'être ici pour charger son téléphone et sa batterie externe qu'il avait eue pour vingt dollars. Une fois les prises trouvées, il brancha en premier son téléphone et profita de l'attente pour se sustenter. Les petits fours étaient délicieux, et il ne manqua pas de se resservir plusieurs fois pour s'en délecter. Aussi, il se permit de déboucher une bouteille de vin rouge pour se servir un verre. Il n'entendit même pas la personne rentrer dans la même pièce que lui, trop concentré à goûter le vin rouge d'une valeur sûrement trois fois plus chère que son loyer mensuel.

L'ennui, lorsqu'il s'agit d'organiser une prise dans un immeuble sans électricité, c'est qu'on n'a pas ce qu'il faut pour se préparer correctement. Je n'ai que rarement croisé la propriétaire des lieux, tout au plus l'ai-je aperçue de loin lors d'une de ces innombrables soirées, mais je me fais une idée relativement claire de la personne. Et croyez-moi, je doute fort que l'on puisse seulement ouvrir la porte de son bureau avec une épingle à cheveux. Je ne sais pas à quel point la pièce est sécurisée mais je l'imagine franchement paranoïaque, alors j'ai pris mes dispositions... Seulement, il semblerait que je ne sois pas la seule. Elle n'a pas quitté son bureau depuis le début de la soirée, autant dire que la mission s'annonce compliquée. 

Fort heureusement, il reste une pièce dans laquelle me réfugier. La cuisine me permet non seulement de goûter aux plats préparés pour l'occasion, mais aussi de garder un oeil sur la porte du bureau, que j'aperçois de loin, au bout du couloir. Ainsi je suis certaine de ne pas louper la potentielle évasion de Royal. Pour l'heure, la porte est bel et bien close, et la cuisine accueille son lot de geeks visiblement ultra préparés. Je m'approche d'eux en dégainant mon téléphone. « Eh, vous croyez qu'il reste une prise sur laquelle je peux me brancher ? »

Lowen n'était pas vraiment à l'aise à l'idée de faire de nouvelles rencontres. Il était là simplement pour se faire un peu plus d'argent pour finir sa fin de mois, et également pour profiter de l'électricité au passage. Mais il n'avait pas prévu de perdre son client qui avait soudainement décidé que la barrière du langage n'en était pas une, finalement. Tant pis, il le retrouverait plus tard. Pour le moment, il s'occupait de charger son téléphone et attendait également pour charger sa batterie externe. Autant profiter de tout ce qui est donné, il consommait aussi allègrement le vin et les mets disposés dans la cuisine. Le bonhomme qui arriva n'était guère très amical, mais ça allait à Lowen qui lui sourit de la même manière pour éviter d'avoir une discussion probablement gênante. Mais c'était bien trop tard pour éviter la gêne, dont le rouge montait aux joues de Lowen. La présence de l'individu n'était pas sans conséquence.

Cela dit, une autre personne entra dans la pièce, plus amicale que la précédente visiblement. Lowen manqua de s'étouffer avec sa bouchée de peu, il toussa une ou deux fois pour s'en remettre, but une gorgée de son vin avant de pointer du doigt la prise à côté de lui, libre près de celle utilisée par lui-même. « Ici. » dit-il en détournant les yeux, visiblement mal à l'aise. Décidément, cet endroit était plein de gens comme lui, qui voulaient profiter de la richesse de cet étage pour palier à la pauvreté du leur.